Permettre de signaler en ligne les dépôts sauvages, mais aussi les installations de caravanes, les opérations de défrichement illégales ou encore de constructions non autorisées, c'est désormais possible grâce à la plateforme en ligne « Vigimitage » lancée par la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer).
La société anonyme, sans but lucratif, qui remplit des missions d'intérêt général, sous tutelle des ministères de l'Agriculture et des Finances, met gracieusement ce portail interactif à disposition des collectivités locales à qui il est exclusivement dédié.
C'est en Seine-et-Marne qu'il est testé en premier, avant qu'il ne soit disponible pour toutes les collectivités d'Ile-de-France à partir du mois de juin, puis déployé sur tout le territoire français en 2022. Il doit aussi être décliné en application mobile.
Les municipalités ainsi que les intercommunalités ou même le conseil départemental peuvent ainsi se connecter à la plateforme pour y géolocaliser sur une carte, la ou les différentes formes de mitage, dont elles sont victimes.
Objectif : aider et accompagner ces collectivités dans la lutte contre ces nuisances et tout particulièrement les municipalités des petites communes, qui manquent parfois de moyens.
« Face aux différentes formes de mitage, la vigilance des élus est essentielle d'autant que certains secteurs sont propices à l'apparition du phénomène. C'est pourquoi, en coordination avec les services de l'Etat et de la région Ile-de-France, la Safer a développé ce nouvel outil innovant dans la lutte contre le mitage, explique Paul Lefèvre, chargé de mission à la Safer. Sur Vigimitage ils peuvent trouver des modèles d'arrêté de mise en demeure et procès-verbaux de constatation et bénéficier d'une veille réglementaire. Il s'agit de les aider à comprendre que ces procédures sont faisables. »
Près d'une quinzaine de municipalités ont déjà eu recours à Vigimitage pour effectuer des signalements, comme Gouvernes, Moussy-le-Neuf, Brie-Comte-Robert ou Saint-Aulde.
Certains des maires des communes, déjà utilisatrices de Vigimitage, sont séduits par le dispositif. « J'ai eu le privilège de tester l'application avant qu'elle ne soit lancée. Avec cette plateforme, nous disposons d'une boîte à outils pour savoir quelles procédures suivre, quels arrêtés appliquer. Avant, il fallait faire des recherches sur Internet pour se référer aux bons textes, précise Romain Senoble (SE), le maire de Forges, village de 420 habitants. Les dépôts sauvages de particuliers sont récurrents dans les chemins et au bord des routes dans notre commune et nous n'avons pas de police municipale, poursuit l'élu, également directeur administratif et financier à la Safer. Leur ramassage coûte entre 3000 et 4000 euros à la ville chaque année sur un budget de 250 000 euros et alors que les dotations de l'Etat se sont effondrées. »
Même son de cloche du côté de la maire de Gouvernes, Nathalie Tortrat. « Nous avons un gros souci avec des gens du voyage qui s'installent fréquemment sur une zone à aménager à la limite de Saint-Thibault-des-Vignes et défrichent parfois des parcelles de notre espace boisé classé. On ne peut pas toujours faire venir la police de la brigade rurale de Marne-et-Gondoire. »
Les élus veulent une réponse plus forte de la justice
Mais la plateforme de la Safer doit aussi aider à recenser les espaces touchés par le mitage, identifier les secteurs à risques, assurer le suivi de l'évolution du phénomène afin de développer un outil d'aide à la décision pour prévenir et lutter contre ces nuisances à une échelle plus globale.
Les maires des communes victimes de ces nuisances récurrentes espèrent que la création d'une base de données centralisée va inciter la justice à être plus sévère avec les contrevenants.
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« À force de signaler il y aura certainement une prise de conscience des pouvoirs publics, mais il faudra que la réponse de la justice suive car c'est loin d'être toujours le cas. En attendant, j'ai décidé de dévoiler sur les réseaux sociaux l'identité des particuliers ou des entrepreneurs que nous parvenons à identifier afin qu'ils viennent ramasser leurs dépôts. Je ne fais que rendre à un propriétaire ce qu'il a laissé », assume Romain Senoble.
Mais d'autres comme le maire de Moussy-le-Neuf, Bernard Rigault (DVD) se montrent plus dubitatifs. « Nous avons signalé les dépôts sauvages sur la plateforme, mais si derrière il n'y a pas de moyens financiers et de réponse juridique pour aider les communes ça ne nous avancera à rien. Jusqu'à présent nous avons toujours déposé plainte en pure perte. On ne peut pas mettre un gendarme derrière chaque habitant ! »
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