Pour ce quatrième scrutin en deux ans, les Israéliens ont moins voté. La gauche et le centre gauche ont bien résisté mais sont incapables de former un gouvernement. Benjamin Netanyahou semble, encore une fois, le plus en mesure de former une coalition grâce au soutien probable de Naftali Bennett.
Comme prévu par les sondages, les deux blocs, pro et anti Netanyahou, ne sont pas clairement départagés. Les résultats sont si serrés que la soirée électorale n’a cessé d’osciller à proclamer la victoire de l’un ou l’autre camp. En fait, les partis contre le Premier ministre l’emportent numériquement, mais leur association ne serait pas politiquement viable. Pour le moment, compte tenu que les bulletins ne sont pas tous dépouillés, aucun camp ne semble en mesure de former une coalition de 61 députés. 61 est devenu un chiffre "magique" selon la formule de Camil Fuchs, sorte de Jérôme Jaffré israélien. Deux jours avant le vote, ce dernier soulignait que "ce n'est pas seulement le taux de participation qui sera crucial, mais quel segment de la société ira voter". Or, il y a tout de même quelques surprises même si la droite reste nettement majoritaire et même se renforce, sachant que la droite elle-même est divisée entre pro et anti-Bibi.
Pour le moment, le seul résultat absolument certain est celui du taux de participation. Avec 67,2%, c’est le plus faible des quatre scrutins depuis avril 2019. Ensuite, les électeurs de gauche et de centre gauche se sont mobilisés pour sauver les partis qui étaient menacés de disparaître notamment le parti Bleu-Blanc de Benny Gantz qui aurait finalement 8 sièges et le Meretz 5. Ensuite, le parti travailliste obtiendrait 8 députés, ce qui doublerait sa présence à la Knesset. En revanche, le parti dominant "Il y a un futur" dirigé par Yaïr Lapid serait à 17 sièges, un peu en deçà des 20 annoncés par les sondages. Quant aux partis arabes, l’explosion de la liste unifiée en partie orchestrée par Netanyahou, leur a été fatale ; ils n’auraient que 11 sièges contre 15 précédemment.
A droite, le Likoud perdrait 6 sièges passant de ses actuels 36 sièges à 30, ce qui n’a pas empêché Benjamin Netanyahou de déclarer mardi soir: "Cette élection est une énorme victoire pour la droite et le Likoud sous ma direction". Cela étant dit, les opposants à Benjamin Netanyahou sont également en deçà des prévisions des sondages. Guideon Saar, qui a fait scission du Likoud et créé le parti Nouvel Espoir, est crédité de 6 sièges et Yamina, dirigé par Naftali Bennett, de 7. A droite également, les partis qui ont juré allégeance à Netanyahou se renforcent. D’un côté, les deux partis ultra-orthodoxes maintiennent leurs 16 députés et surtout le Parti sioniste religieux dirigé par Bezalel Smotrich, qui a viré à l’extrême droite, est crédité de 6 sièges, alors qu’il était absent de la précédente Knesset.
Le parti clé est Yamina qui veut dire "A droite" en hébreu. Naftali Bennett a clairement dit pendant la campagne, qu’en fonction des résultats, il pourrait s’allier aux deux camps, devenant ainsi le faiseur de roi de ce scrutin. Benjamin Netanyahou l’a donc appelé dès mardi soir pour commencer à négocier une alliance. Mais Bennett, lui, a décidé d’attendre les résultats finaux. Officiellement, ils seront publiés le 31 mars après comptage des bulletins des soldats et de l’étranger. Le plus logique est qu’il rejoigne le camp de Netanyahou auprès duquel il a déjà occupé six postes ministériels depuis 2013, mais une chose est sûre, il fera payer très cher son ralliement puis son soutien tout au long de la législature. Sans lui, rien n’est possible. Le jeu des tractations et des rebondissements ne fait que commencer. Cependant, même si les deux hommes arrivent à s’entendre il manquerait encore 2 sièges.
Pour Aluf Benn, journaliste du quotidien de gauche Haaretz, les résultats "montrent que l'événement principal de l'année écoulée - le coronavirus - n'a pas du tout influencé les électeurs israéliens." Ainsi, l’immense succès de la vaccination auquel le Premier ministre sortant a largement participé, et dont il a fait l’axe principal de sa campagne, n’aurait pas joué un effet plus déterminant que la mauvaise gestion de la pandémie avant la vaccination. En effet, Israël détient aussi le triste record du nombre de jours de confinement. Ainsi, les deux phénomènes se seraient neutralisés. En fait, les sièges perdus par le Likoud ont été siphonnés par Nouvel Espoir constituée d’anciens membres du Likoud dont leur chef Guideon Saar. Et c’est peut-être là, justement, que Netanyahou pourra trouver les deux sièges qui lui manquent pour le moment, même si ce parti avait juré au grand jamais qu’il ne gouvernerait pas avec Bibi. Mais, cette posture supposait un vrai succès électoral, ce qui n’est pas le cas.
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