Avant même de présider une réunion publique sur le sujet mardi, la ministre a affiché sa préférence pour le confinement des déchets industriels dangereux enterrés sur le site du Haut-Rhin, contrairement au souhait des associations et élus locaux. Une décision est attendue d'ici fin janvier.
«Je ne voulais pas qu’une décision soit prise d’un bureau parisien.» C’est ainsi que la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a ouvert mardi la réunion en visioconférence sur l’avenir de Stocamine. C’est la première visite d’une ministre de l’Ecologie à Wittelsheim (Haut-Rhin) depuis l’incendie de 2002. A l’arrêt, ce site de stockage «réversible» de déchets industriels dans une ancienne mine de potasse se referme sur lui-même. A terme, l’eau potable de la nappe phréatique d’Alsace communiquera avec les barils et sacs d’amiante, d’arsenic ou de mercure, en dépit des «barrages» en béton. Depuis des décennies, associations et élus locaux plaident pour remonter un maximum de choses.
Pourtant, Barbara Pompili s’est fait un avis dans son bureau. Avant même d’être descendue de son TGV et de visiter la mine, elle exprime «une préférence a priori» pour le confinement total de la mine, dans une interview au journal l’Alsace. Ces propos font l’effet d’une douche froide pour la centaine de manifestants réunis l’après-midi face aux grilles, dans le froid. Ils espèrent interpeller la ministre. Aucun temps d’échange avec les associations n’est au programme. Le mauvais souvenir de François de Rugy remonte. Le rassemblement rappelle janvier 2019, lorsque l’ancien ministre avait ordonné «de Paris» l’enfouissement définitif, allant à l’encontre d’une expertise technique et d’un rapport parlementaire. Face à la bronca, il avait concédé une nouvelle étude.
Dans la soirée, la ministre revient d’ailleurs sur ces commandes à répétition. «Des manœuvres dilatoires pour gagner du temps ? C’est pas faux», lance-t-elle au sujet de ses quinze prédécesseurs dont «pas un ne s’est bougé le cul pour venir». Face aux 180 personnes connectées sur Facebook, elle use d’un langage familier, voire grossier, en décalage avec la gravité du ton des multiples intervenants. «L’eau passera, quoi qu’en disent les experts. Si j’étais à votre place, je prendrais la décision de déstocker ce qui est facilement déstockable», demande Salvatore Di Rosa, ancien salarié de Stocamine. «Le confinement c’est la signature de l’inaction que vous poserez, ce n’est pas possible», s’alarme Hubert Ott, représentant d’une association locale et du Modem Alsace «dans la majorité présidentielle», appuie-t-il.
Selon le député de la circonscription, Raphaël Schellenberger (LR), déjà descendu plusieurs fois, la rapide visite lui a montré «des blocs choisis» à savoir ceux «en mauvais état». Devant les caméras, la «petite fille de mineure» joue sur l’émotion après «un moment fort», la larme à l’œil. Elle reprend vite ses esprits : «Quand je sors de cette mine, je n’ai pas vu beaucoup d’arguments qui m’incitent à déstocker.» Elle met en avant la «sécurité» des mineurs et un risque qu’elle juge limité pour la nappe phréatique. Sa visite expéditive ? «J’ai vu des blocs en mauvais état et en bon état, et les travaux pour préparer le confinement», affirme-t-elle, concédant «qu’on ne peut pas tout voir en une heure». Elle ne se souvient pas avoir demandé le déstockage avec son ancien parti EE-LV. «Franchement, je ne sais plus, il est clair que la situation d’il y a douze ans n’est absolument plus celle de maintenant», balaie-t-elle. Avant de partir, Barbara Pompili a simplement dit qu’elle était «prête à bouffer de l’étude» pour éventuellement changer d’avis d’ici la fin janvier.
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